A propos de l'article de Michel Schmidt-Chevalier :

"Les Peintures Rupestres dans le Sud-ouest de la France ont-elles été Réalisées par des Femmes ?"

par Jacques Mandelbrojt

[l'article ci-dessous n'a pas été retenu par Le Monde ; deux ans après, je (OSC) décide de le placer dans ces pages]


J'ai eu l'attention attirée par la lettre "La Femme Préhistorique" de Françoise Trillot parue dans "Le Monde" du Dimanche 6-Lundi 7 Mai, dans laquelle elle exprime sa conviction que les peintures préhistoriques étaient réalisées par des femmes.

J'aimerais y ajouter quelques commentaires, après presqu'un mois qu'il m'a fallu pour retrouver l'article évoqué ci-dessous (mais qu'est-ce qu'un mois devant les 20 000 années qui nous séparent des Cro-Magnons !).

Il y a 20 ans le peintre et mosaïste Michel Schmidt-Chevalier, décédé depuis, publiait dans la revue internationale LEONARDO ( vol 14 No.4 1981 pages302, 303) un article intitulé "Were the Cave Paintings in Southwest France Made by Women ?" ("Les Peintures Rupestres dans le Sud-ouest de la France ont-elles été Réalisées par des Femmes ?") dans lequel il énumérait diverses raisons qui lui suggéraient que ces peintures avaient pu être réalisées par des femmes.

En voici quelques unes, parmi d'autres, très brièvement résumées :

- Dans les peintures rupestres il est fréquent que des femelles enceintes de bisons soient représentées.
- Les mains dont on voit les contours semblent être des mains de femmes .
- Une empreinte de pied de femme a été identifiée à " Pech Merle "
- La grotte nommée " l'Abri du Cap Blanc " contient une tombe de femme avec plusieurs objets et vêtements
- Les symboles peints sur les parois peuvent évoquer des ornements et dessins géométriques réalisées plus tard à l'ère néolithique sur des poteries et dont on a pu montrer qu'elles étaient réalisées par des femmes , comme celles réalisées au sud du Sahara ou dans des tribus Amérindiennes.
- Enfin et surtout les représentations d'animaux expriment une sorte de respect envers ces animaux source de nourriture, et même les bisons mâles représentés paraissent doux et calmes., à l'encontre des peintures de Tassili où transparaît un caractère plus agressif.

J'ajoutais à la fin de cette publication une note de bas de page dans laquelle je suggérais une analyse permettant de rendre plausible l' hypothèse de Michel Schmidt-Chevalier (c'était avant l'usage intensif que l'on fait actuellement des analyses utilisant l'ADN) :

Si comme l'ont suggéré certains auteurs [H. De Lumley dans La préhistoire française, Vol.1, Les Civilisations paléolithiques et mésolithiques (Paris : Editions du CNRS, 1976)], c'est l'urine qui servait de diluant dans les peintures préhistoriques, et si de plus elle était d'origine humaine et non animale, une microanalyse de ces peintures permettrait de reconnaître s'il s'agit d'urine d'homme ou de femme… Il semblerait en effet, d'après les experts, que l'on pourrait, encore maintenant, les distinguer d'après la présence d'hormone féminine ou de ses produits de décomposition.

Evidemment , dans le meilleur des cas il ne s'agirait que d'un indice qu'il faudrait alors interpréter …un premier pas pour tenter de justifier une intuition d'artiste, celle de Michel Schmidt-Chevalier.

 

 Jacques Mandelbrojt
"Honorary Editor" de LEONARDO
Marseille le 10 juin 2001